Hansi un peintre alsacien, polémiste et dessinateur de l'Alsace heureuse.

Avec Hansi au moins, on le tient, notre artiste connu, reconnu, pas maudit, pas exilé à Paris et dont la quasi-totalité de l’œuvre a pris l’Alsace comme sujet ! C’est en tout cas ce qu’on est tenté de se dire, tant le bonhomme est emblématique de la région, au point d’en être devenu une marque déposée (lire ci-dessous)…

Il est vrai qu’outre sa présence muséale à Unterlinden – dont, après son père, il fut le conservateur – et à Riquewihr, ses albums sont dans toutes les médiathèques et bibliothèques, et servent encore parfois, dans les familles alsaciennes, d’entrée en lecture pour les enfants, tandis que les multiples objets portant sa griffe rencontrent un succès jamais démenti dans les ventes aux enchères.

Va donc pour l’auteur de Mon village , de L’Histoire de l’Alsace racontée aux petits enfants , d’innombrables cartes postales et dessins patriotiques, d’enseignes commerciales et de cartes de restaurants ou encore de ce feuilleton, publié en 1950, par notre propre journal.

Quoique… Si son nom obtient les meilleurs scores au quiz des artistes made in Alsace , il est encore aujourd’hui à l’origine de quelques remarques restrictives sur ses « outrances » anti-germaniques. Faut-il rappeler le contexte ? Que, d’une guerre à l’autre, ce fils d’un boucher colmarien devenu bibliothécaire et archiviste, né « allemand » en 1873, engagé volontaire au 152eRI en 1914, a payé son militantisme francophile de multiples tracasseries, voire de la privation de sa liberté ?

Reconnaissance et anonymat

Qu’il a même été laissé pour mort, en 1941, par trois nervis de la Gestapo venus le traquer jusqu’à Agen ? Que dire, par contre, de Jean-Jacques Waltz à l’état-civil, sinon que sa notoriété est inversement proportionnelle à celle du pseudo dont il s’est servi ?

Une dualité antagoniste, dont Waltz a souffert lui-même, comme le rappelle Pantxika Béguerie-De Paepe : à partir de 1920, il lui arrivera, au bas de ses aquarelles, de faire suivre nom et prénom « officiels » de l’avatar qui, seul, le fait reconnaître. Une manifestation, croit savoir la conservatrice du Musée Unterlinden, de son « ressentiment » , « convaincu de la reconnaissance, par tous, du polémiste alors même que l’aquarelliste ou le graveur restait dans l’anonymat ».

Car, après le pragmatique et sage apprentissage qui aurait dû en faire un dessinateur textile, Jean-Jacques Waltz a mené longtemps de front la carrière de pamphlétaire intrépide à laquelle l’entraînait un attachement viscéral au drapeau bleu-blanc-rouge et une quête perfectionniste de graveur et d’aquarelliste dont le but, toujours repoussé, était d’embrasser ce que son cœur entendait de plus beau dans les paysages chantés par son cher Colmar et sa chère Alsace.

« Un découvreur infatigable »

Dessins, eaux-fortes, aquarelles déclinent en effet, des plus connues aux plus insolites, les rues, les places, les maisons de sa ville, mais aussi toutes ces petites villes et tous ces villages alentour. Autant d’échos des flâneries, au gré desquelles il prenait soin d’améliorer sa technique. Jusqu’à, dans les années 1937-1938, nous dit Pantxika Béguerie-De Paepe, « une série d’aquarelles de grande qualité ». L’universitaire Benoît Bruant, qui a également planché sur Jean-Jacques Waltz, tient que méconnaître l’aquarelliste reviendrait à « passer à côté d’un paysagiste sensible et moderne ».

« Il est un découvreur infatigable des petites villes du vignoble et de leur patrimoine populaire , lâche ce spécialiste de l’histoire de l’art et ancien conservateur du cabinet des estampes. Ce qu’il apporte vraiment à sa région c’est un ressourcement, dans le paysage classique, un regard sur l’Alsace qui se teinte des couleurs de la modernité de la première moitié du XXe siècle. » « Hansi, nous dit encore Benoît Bruant, propose un réenrichissement extraordinaire du répertoire d’images alsacien qui a une tendance si naturelle à s’assécher autour de quelques icônes un peu vides de sens. »

Des clochers solitaires, perdus au milieu des champs, aux hauteurs d’Orbey, en passant toujours par Colmar, Hansi/Jean-Jacques Waltz a ainsi exprimé avec éloquence un amour de son pays qui explique sans doute – s’il en est besoin – la férocité du trait qu’en un temps de sa vie il a réservé, dans ses écrits et dans ses dessins, à ceux qu’il percevait comme ses insupportables oppres-seurs.

Il ne serait sans doute que juste de reconnaître aussi, dans son œuvre, le reflet de ce qu’en dépit de la modernité en marche, la nature et les pierres séculaires nous ont laissé d’immuable : l’ondulante douceur des collines, le vert des prairies et la palette des ocres de nos églises qu’il nous a laissés en héritage.

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